Arles 2009
C’est quoi être photographe en 2009 ?
Cette année c’était version commando. Une journée seulement, aller-retour dans la journée en train.
Donc forcément il y avait des choix à faire, un parcours à respecter. pas d’errance comme l’année dernière.
Le tout avec cette question qui me trotte dans la tête depuis quelques mois : »C’est quoi être photographe ? ». Et si, comme un écho qui fait bien les choses, le récent hors série de Réponses Photo a récemment abordé ce thème et engagé une réflexion, je n’arrive toujours pas à (re)trouver les certitudes que j’avais encore il y a quelques temps.
Peut-être que toutes les expositions que j’allais voir me permettraient de, au moins, redéfinir les contours de mon interrogation. Commençons par regarder ce que font les autres…
Justement, après lecture de différents magazines photos dans le train je débarque à Arles et entame mon parcours, finalement pas si sélectif que ça car j’ai pu voir plus que ce que j’avais prévu.
Une première constatation…
L’Olympus Pen E-P1 fait une apparition fracassante dans le paysage photographique. C’était la tendance de la journée.
J’ai aimé
> Jean-François Spricigo, nommé pour le Prix de la découverte (et malheureusement pas retenu au final…). Une belle découverte; il se dégage de ses images une ambiance comme je les aime. une ambiance d’entre deux. Il dit ‘’Une expérience ne nous appartient pas, seuls nos souvenirs nous appartiennent ’’ et il part de ce constat pour cette série. Ces photos évoquent plus qu’elles ne décrivent. Elles rappellent plus qu’elles ne définissent.
> Eugène Richards, et là aussi il est question d’ambiance avec sa série »The blue room ». Images d’une chromie simple et maîtrisée. On se sent dans la peau d’un voyeur, on s’imagine, on se pose des questions. On voudrait tirer les rideaux, soulever les draps, ouvrir les portes pour aller encore plus loin dans ses images.
A voir aussi d’autres expositions dont Book montage et l’incroyable portrait qu’il a fait de sa femme.
> Willy Ronis… ah ! Willy Ronis… Quel bonheur !
On regarde ses photos comme on feuillette un album de famille; avec ses joies, ses peines ; avec sourire et émotion. C’est notre vie qui défile, c’est notre vie qu’il voit et qu’il nous montre. C’est le portrait d’une société, d’autres époques.
Soit on connaît déjà ses photos et on prend plaisir à les revoir ; soit on ne les connaissait pas (oui c’est encore possible) et on s’émerveille.
Le grand moment de cette édition.
Une phrase écrite sur le mur m’accroche. Willy Ronis a dit ‘’La photographie, c’est le regard. On l’a ou on ne l’a pas’’. Et si c’était tout simplement ça la définition de la photographie. Il faut que je m’accroche à ça. Pour continuer.
Sinon…
> La rétrospective pour les 40 ans des Rencontres regorge de photos qui illustrent bien pourquoi le terme de rencontres a été choisi par les fondateurs de l’évènement, et nous fait voyager à travers le temps. On sent en effet que tout est né d’une rencontre entre photographes, entre potes.
> Je n’arrive toujours pas rentrer dans l’univers de Nan Goldin, ça ne me touche pas, et même pire je ne le comprends pas. J’ai toutefois apprécie le travail réalisé par un de ses invités, Jean-Christophe Bourcart. Un travail documentaire sur la ville de Camden, NJ, aux USA, mené comme la rédaction d’un journal intime. Un vrai travail de photo-journaliste.
> A voir les photos de Paulo Nozolino qui en plus d’être intéressantes nous montrent qu’il est, encore, possible d’exposer des tirages 18×24 cm sur des murs ! Bien loin des canons actuels…
> A ne pas manquer l’exposition Duane Michels, photographe très fertile et imaginatif. Maître dans l’art du portrait, surtout génial pour ses séquences d’images qui racontent une histoire. Notamment »The journey of the spirit after the death ». Et si c’était vraiment ça ?
> Et pour fini dans les coups de cœur en vrac; Attila Durak qui montre la Turquie avec joie et couleurs; Giorgia Fioro, fidèle à elle même, sobre, simple, ses images vont droit au cœur; et Laurence Leblanc, pour voir l’Afrique autrement…
Au final
Depuis Willy Ronis qui prenait en photo les grévistes qui défendaient leurs droits au milieu des années 30 jusqu’à l’UPC qui lance un appel, pendant les Rencontres, pour défendre les droits de ceux qui veulent vivre de la photo, du temps est passé. Beaucoup de questions se posent sur cette profession.
Et s’il fallait commencer par là ? Réaffirmer haut et fort que photographe est un métier !
Et même si je pense qu’il est effectivement nécessaire, et vital, de redéfinir ce métier, je finirai ce billet avec les mots de Willy Ronis. Pour garder la beauté et la magie qui font aussi la photo, qui en sont l’essence même.
Justement, en retournant à la gare attendre le train du retour, il était là. Willy Ronis était à la gare, comme moi, attendant son train, le mien !
Willy Ronis est là, en fauteuil roulant. Beaucoup de gens passent à côté de lui, sans apparemment le reconnaître. Suis-je le seul à m’arrêter et oser croiser son regard ? Il discute, gaiement.
J’ai un regard en face de moi.
Et moi ? Est-ce que j’en ai un ? Là est la question…
A l’année prochaine…